Jour 79 - L'eau qui dormait se réveille.
Bon, je ne vais pas lister ceux que j'avais remarqués et pour qui j'avais eu un bon instinct, ceux que je n'avais pas remarqués, mais que j'aurais du et ceux que j'avais remarqués, alors qu'en fait, non. Je n'aurais pas assez de surnoms, et ça ne ferait pas avancer le schmi... voilà.
Je me pose juste une question, à 10 jours de ma prochaine visite croisée. Que s'est-il passé la semaine dernière? Quelle question, hein. Si l'on considère le mythe de l'enfant-éponge, qui n'a de mythe que le nom, tout s'explique. Fatigants. Fatigants plus qu'attachiants. Un schéma ultra-répétitif toute la semaine : des élèves dans l'incapacité de tenir en place, d'accepter de devoir faire un effort de recherche. Des élèves qui ne gèrent ni ne relativisent la frustration, allant jusqu'à cogner, taper, insulter (eux-mêmes et les autres), faire des crises de colère ou de larmes. Les seuls moments tranquilles, c'est quand on chantait. Alors on a beaucoup chanté. Ce n'est pas pour me déplaire, mais je ne peux pas me permettre de les faire chanter toute la journée.
Donc je cogite pour que le rythme de la classe se remette en place, j'ai préparé des jeux, on va discuter encore, on va faire des dessins libres, on va essayer de tourner les apprentissages de manière ludique, tout ça tout ça. M'enfin les gars, je fais ce que je peux hein, je peux pas pondre une pédagogie du tonnerre en 6 mois, pourtant, j'essaie. Mais quand je vois qu'en apprenant la conjugaison du verbe "être" au présent de l'indicatif, en la récitant, j'ai entendu moult "Je suis Charlie, tu es Charlie, il/elle est Charlie, nous sommes Charlie (...)", je me dis qu'il n'y a pas de secrets.
Et autre chose, quand on est censés faire grandir et évoluer une classe, et que quelque chose de probant les empêche d'avancer, mais que l'on n'y peut rien, on fait quoi? On accepte et on se résigne? Bah, non. Enfin, oui. Mais, non. Mind fuck. Je veux dire, quand 5 mois après, on oublie encore les majuscules, ce n'est pas foncièrement grave. Quand on oublie encore les -s du pluriel, ce n'est pas grave, c'est si peu de choses. Mais quand après presque 6 mois on continue à balancer son cahier, ses crayons, à insulter les autres ouvertement en pleine discussion, à parler en me regardant et à me dire "Mais c'est pas moi!" trois secondes et demi plus tard, on fait quoi? Hein? Quand on dit à l'élève Paulo "C'est 8h45 l'école Paulo" et qu'il nous répond "Oui mais ma maman elle dort tout le temps c'est pour ça, et je pourrai pas faire mes devoirs parce qu'elle dort.", on fait quoi? Et quand Th.Sangster se tape la tête au sol de colère de s'être vu refuser le droit d'aller chercher son ballon à l'étage en pleine récré, en balançant son manteau sur le sol trempé de la cour, on fait quoi? Devant les collègues, on soupire. Mais à l'intérieur, c'est la guerre les gars, la guerre. Le mieux, c'est de faire au mieux. Faire au mieux. Et retarder l'entrée dans le clan des "Oh bah lui, de toute façon...".
La galère. Mais pas la galère de petits joueurs, la bonne grosse galère 76 rames.
Bon, allez, allons récupérer tous nos contenants de nourriture pour mettre des dominos imprimés et plastifiés dedans, et récupérer des bouteilles pour mettre des cailloux dedans, parce que ça peut faire de la musique.
Un jour je ferai le top des Leitmotiv des Prophrases, avec dans le top 10 " On sait jamais, ça peut servir !"
Un jour je ferai le top des Leitmotiv des Prophrases, avec dans le top 10 " On sait jamais, ça peut servir !"
1 commentaire:
La lutte quotidienne et incessante du prof, lutte interne mais pas que, celle qui fout les nerfs à vif, celle qui tourmente jour et nuit, qui nous fait nous répéter une phrase jusqu'à ce qu'on se demande qui l'a proférée, celle qui jamais ne sera vaine, celle qui nous fera avancer inlassablement, celle qui nous fera nous planter de temps en temps, dans les règles de l'art ou du cochon.
Hang in there.
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