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A board. Comme le tableau. Prof. Enfin voilà quoi.
(Bannière : Création/dessin d'Anne Montel, parce que c'est bô)

" Et parfois je m'extasie sur la grandeur des petits. "

samedi 23 septembre 2017

Les codes sociaux et les enfants perdus.

Wendy Mohira Darling, que racontais-tu dans tes histoires aux enfants perdus ?




Trois semaines à bord, on peut dire que pour le moment le bateau navigue correctement, même s'il navigue à vue. C'est un sacré boulot, la classe spécialisée. Quand on prend ses habitudes en classe "normale" (gros guillemets même si l'appellation est bien celle-ci), on se permet un peu d'improvisation, et c'est assez confortable en terme d'investissement du temps personnel. Mais là, l'imprévu n'a pas sa place, il n'est pas possible, puis qu'on est sur des profils d'enfant à gros besoins de rituels. Les journées sont à la fois plus rythmées et plus lentes, avec ce sentiment de légitimité à se dire "je prends mon temps" puisqu'avec eux il le faut, prendre le temps. 

Une fois par jour, et ce n'est pas trop, je fais à mes élèves une lecture offerte. S'il y a bien une généralité à faire, c'est que 95% des élèves AIMENT écouter les histoires. Et ceux qui n'y sont pas sensibles ne sont souvent pas disponibles pour l'être. Cette semaine, en fin de journée et dans la lignée d'un projet d'école sur les émotions, nous avons observé des oeuvres d'art où l'on peut lire des émotions (basiques : joie, colère, tristesse, peur...). Bon, je passe les réactions sur le Cri de Munch, on arrive à une oeuvre représentant un homme adulte nu et assez fort, au ventre très arrondi (ALERTE BINOUZE). "On voit son zizi!" En vrai, on ne voyait pas ledit zizi. "On dirait il est enceinte!". Ce à quoi j'ai répondu non sans me questionner "T, est-ce qu'un garçon peut avoir un bébé dans son ventre?" "Beeeeen nooooon" collectif. Bien, gardez ce premier exemple en tête. 

Un autre moment de la semaine, nous avons travaillé sur le plan de l'école suite à un effet zoom de l'observation du trajet à vélo d'un ami. Nous observons le plan et vient le moment où il nous faut différencier par un symbole les toilettes des filles et celles de garçons. Nous écrivons "WC" et je me vois dans l'obligation, en évitant de coller une jupette aux fillettes, de coller des cheveux longs au petit bonhomme censé représenté une fille. Je précise d'emblée qu'on peut être un garçon et avoir les cheveux longs. Ce second exemple m'a laissée également perplexe. 

Dans certains classes, nous pouvons aller plus loin et nous barrer loin dans les questions philo, puisque nous avons face à nous des élèves avec une base émotionnelle "normale" (si tant est que cette normalité existe), qui se sont déjà construits en partie. Mais en classe spécialisée, la question se pose. La plupart des enfants n'ont pas acquis la construction personnelle logiquement atteinte à leur âge. Ils sont donc, comment dire, "paumés"? Moui, le mot s'applique pamal à la situation. Entre histoires de vie pourries et retards divers et variés, nous observons qu'à trop leur laisser de choix, ils ne savent plus que choisir. Le genre qui, à l'opposé de moi-même, serait en panique devant un buffet, et finirait par ne rien manger. Nous n'avons donc pas d'autre choix que de leur proposer les codes sociaux "normalisés" puisque cela les rassure. Je reste un peu embêtée car malgré leur retard de développement, ils ont aussi le droit de ne pas être enfermés et de choisir ce qui leur convient. En fait, oui, je suis bien emmerdée. Et j'espère qu'on leur laissera tout de même le choix. 




Et sinon, dans la classe, ça va. Ces élèves nous font fonctionner à 125% de notre VMA de calme et de patience, tant est si bien qu'on termine la journée avec tout juste la capacité de faire cuire des pâtes. Mais bon. To be continued :) 

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