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A board. Comme le tableau. Prof. Enfin voilà quoi.
(Bannière : Création/dessin d'Anne Montel, parce que c'est bô)

" Et parfois je m'extasie sur la grandeur des petits. "

mercredi 11 septembre 2019

Selon les complotistes, l'année 5 n'a pas existé.

Selon mon corps, l'année 5 a été tempétueuse. J'ai d'ailleurs pris 10 ans d'âge en 10 mois.



J'ai eu la chance d'obtenir une mutation vers mon département d'origine, sans trop de difficulté. Comme cela faisait partie de mes voeux, j'ai obtenu à nouveau un poste en ULIS école, dans une école dont on m'a dit beaucoup de bien. 

J'aurais bien du mal à résumer l'année que j'y ai passée. Elle n'a rien eu à voir avec la première année en enseignement spécialisé. Elle a été riche, étouffante, fascinante, épuisante, stimulante, déprimante, et m'a secouée dans tous les sens. J'ai découvert un autre fonctionnement, un département aux multiples lacunes concernant l'enseignement spécialisé, mais j'ai découvert cela dans le cadre d'un travail d'équipe hors-norme. Une bonne part des élèves de cette année 5 n'était pas porteurs d'une déficience intellectuelle reconnue, génétique. Ces enfants souffraient et souffrent encore de telles carences affectives, sociales et éducatives que leur déficience intellectuelle s'est construite sur ce beau tas de fumier. 

On m'a annoncé une année terrible avec des élèves "fous furieux", dixit la personne qui quittait le poste. J'ai découvert des enfants perdus et ai tenté de les ramener à la maison. Le syndrome de Wendy. Je tiens un concept ?



J'ai eu le coeur qui battait fort quand certains pétaient les plombs, m'insultaient ou me frappaient tant leur cerveau était incapable de gérer la tempête émotionnelle qu'ils traversaient. Je suis rentrée le soir épuisée, vidée, démotivée. Mais j'étais sur le front le lendemain matin, et je n'ai jamais eu tant de mal à quitter une école au mois de juillet. Il est un peu tard pour raconter ici un vécu quotidien, je regrette un peu de ne pas l'avoir fait, mais ce n'est pas grave car l'apprentissage reste. Et confirme certaines de mes intuitions présentes dans ce que je lis de mes premiers articles ici. Du coup, globalement, c'est assez satisfaisant. 

Pour cette année 6, me voici endossée du costume de remplaçante, ce qui ne me remplit pas excessivement de joie. C'est une situation plutôt confortable, soirées et weekends tranquilles. Mais si peu satisfaisante et gratifiante. Et je n'attends qu'une chose, c'est le potentiel remplacement dans mon école d'année 5, pour me retrouver "comme à la maison" avec mes collègues/amis, et dans l'enseignement spécialisé. 

En espérant relancer les chroniques ici cette année. Merci, bisous, merci. 


mardi 20 février 2018

102 jours dans ma classe d'handicapables.

Nous atteignons quasiment une demi-année (oh, wait, en fait, ça y est, on a dépassé la demi-année), et je n'ai posté ici qu'un court article concernant le début de cette année remuante en classe "spéciale". Et en cinq mois, il peut se passer un sacré paquet de choses. 

Nous partageons énormément de choses, avec ma classe. Notamment nos muqueuses. 

Comme le sait la plupart des habitants de l'Ouest de la France, l'hiver n'a pas été des plus agréables et lumineux dans cette partie de l'hexagone. L'épisode de grippe se termine, nous profitons désormais de l'épisode des gastro. J'étais déjà ravie de partager quatre jours sur sept le contenu du nez de B., je peux maintenant profiter du contenu de l'estomac de certains élèves. C'est une étape que je n'avais pas franchie depuis mon année de stage il y a 4 ans, proche du rite initiatique. La première fois, on m'a vomi sur les pieds (nus). Avant-hier, on m'a repeint le mollet. Bientôt le décolleté, j'ai hâte. 



Et alors, comment on fait, avec des enfants en situation de handicap? 

#Lepointdico Google me propose deux définitions au mot "handicap" : 

  1. 1.
    Course de chevaux ou épreuve sportive où l'on impose aux meilleurs concurrents certains désavantages au départ afin d'équilibrer les chances de succès.
  2. 2.
    Déficience physique ou mentale, congénitale ou acquise

La M.D.A (Maison Départementale de l'Autonomie) me propose la suivante : 

Constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. " 

La course de chevaux, c'est rigolo, mais honnêtement, la réalité est plus proche de la 3ème définition. 

#Findupointdico

On fait, avec des élèves en situation de handicap, comme on fait dans les classes dites "normales" avec les élèves dits "en difficulté". Sur 102 jours, je compte peut-être 5 ou 6 heures de travail fait collectivement, et le reste fait avec des groupes de 4 ou 5 élèves maximum. 

Avec une classe spécialisée, on apprend l'art de l'emploi du temps. On apprend à combiner l'emploi du temps de chaque enfant selon ses prises en charge (orthophoniste, psychologue, psychomotricien, thanatopracteur, etc), ses temps d'inclusion (temps de travail dans les autres classes en fonction de l'âge et des compétences à travailler), et les temps où il doit être avec moi pour avancer dans ses apprentissages. Le tout, multiplié par douze, soient une petite cinquantaine de données à traiter dans un petit emploi du temps. Je deviens une machine. Et après 102 jours, je commence à voir un peu plus clair dans cette gestion des temps de travail. Sans préciser qu'il faut cela soit optimal pour chaque élève. Ça aura coûté une journée d'hospitalisation à la sécu ces conneries, mais bon, ça valait le coup. Ou le coût. Bref. 



Mes élèves en situation de handicap n'ont pas de fauteuil, pas d'implants cochléaires ni de canne d'aveugle. Ils ne bavent pas (quoique, certains...cf Les muqueuses). Mes élèves en situation de handicap sont bizarres. 

#Lepointdico2

Si on en croit Google, bizarre signifie : 

  1. 1.
    Qui est inhabituel, qu'on s'explique mal.

    Il a des idées bizarres.

    synonymes :curieuxinsolitesaugrenuzarbi
  2. 2.
    (personnes)
    D'un caractère difficile à comprendre, fantasque.

    Il, elle est un peu bizarre.

#Findupointdico2


Qu'on s'explique mal donc, qui est inhabituel. D'un caractère difficile à comprendre. Mes élèves ne parviennent parfois pas à tracer un 2 de haut en bas de gauche à droite, ni à me dire que B + I = Bi et que T + E = te (hihi). Pour eux, le chemin de l'implicite et du second degré est sinueux, casse-gueule même, voire inexistant. Mais cet élève, repère l'inhabituel quand je lui raconte que je mange du fromage le matin, il est subjugué même. Et il traverse la cour sous la flotte pour m'aider à porter un carton plus lourd que moi, en ajoutant un "C'est trop lourd pour toi maîtresse". Avec lui, l'auteur de Mon Copain des Fermes aurait eu l'air bien con, car on tient un challenger de la spécialité. 

Un autre élève, K. (Kalypso, bien entendu), est arrivé en septembre sans savoir lire. Il est totalement obnubilé (ça, d'ailleurs ça veut dire "couvrir le ciel de nuages", ça rend les obsessions jolies) par ce qui ressemble de près ou de loin à un félin, mais a un vocabulaire aussi précis qu'un jeune collégien. Ce ne sont que des exemples, bien entendu. 

En réalité, l'enseignement au sein de ce genre de dispositif, c'est surtout envoyer balader les instructions officielles en termes de programmes (évidemment, en gardant l'éthique, on n'a pas encore réussi à inclure le strip-tease au sein des apprentissages),  et juste de suivre un programme logique pour chaque élève. Chaque élève a son point A, son point B, sa propre échelle. Ils ne sont pas 28 à tenter de grimper à une seule même échelle normée, avec des conditions physiques plus qu'individuelles. Cette remontée d'échelle n'est pas chronométrée, tant que durant ces quelques années, quelques barreaux ont été dépassés. On a tout de même entre les mains l'avenir d'enfants en marge, pour éviter qu'ils ne le restent trop. 



Chaque élève a, dans l'année un temps de réunion pour faire le point sur sa scolarité, pour vérifier que le dispositif convient à ses besoins. A quel moment ne fixons-nous pas ça pour chaque élève? Et si on inversait les principes de classe spéciale contre ceux de classe normale? Pas assez de moyens, pas assez de personnels, trop de flemme ? Les trois ? Pas assez rentable ? 



Les solutions sont simples. Allez, je retourne avec mes handicapables. 




samedi 23 septembre 2017

Les codes sociaux et les enfants perdus.

Wendy Mohira Darling, que racontais-tu dans tes histoires aux enfants perdus ?




Trois semaines à bord, on peut dire que pour le moment le bateau navigue correctement, même s'il navigue à vue. C'est un sacré boulot, la classe spécialisée. Quand on prend ses habitudes en classe "normale" (gros guillemets même si l'appellation est bien celle-ci), on se permet un peu d'improvisation, et c'est assez confortable en terme d'investissement du temps personnel. Mais là, l'imprévu n'a pas sa place, il n'est pas possible, puis qu'on est sur des profils d'enfant à gros besoins de rituels. Les journées sont à la fois plus rythmées et plus lentes, avec ce sentiment de légitimité à se dire "je prends mon temps" puisqu'avec eux il le faut, prendre le temps. 

Une fois par jour, et ce n'est pas trop, je fais à mes élèves une lecture offerte. S'il y a bien une généralité à faire, c'est que 95% des élèves AIMENT écouter les histoires. Et ceux qui n'y sont pas sensibles ne sont souvent pas disponibles pour l'être. Cette semaine, en fin de journée et dans la lignée d'un projet d'école sur les émotions, nous avons observé des oeuvres d'art où l'on peut lire des émotions (basiques : joie, colère, tristesse, peur...). Bon, je passe les réactions sur le Cri de Munch, on arrive à une oeuvre représentant un homme adulte nu et assez fort, au ventre très arrondi (ALERTE BINOUZE). "On voit son zizi!" En vrai, on ne voyait pas ledit zizi. "On dirait il est enceinte!". Ce à quoi j'ai répondu non sans me questionner "T, est-ce qu'un garçon peut avoir un bébé dans son ventre?" "Beeeeen nooooon" collectif. Bien, gardez ce premier exemple en tête. 

Un autre moment de la semaine, nous avons travaillé sur le plan de l'école suite à un effet zoom de l'observation du trajet à vélo d'un ami. Nous observons le plan et vient le moment où il nous faut différencier par un symbole les toilettes des filles et celles de garçons. Nous écrivons "WC" et je me vois dans l'obligation, en évitant de coller une jupette aux fillettes, de coller des cheveux longs au petit bonhomme censé représenté une fille. Je précise d'emblée qu'on peut être un garçon et avoir les cheveux longs. Ce second exemple m'a laissée également perplexe. 

Dans certains classes, nous pouvons aller plus loin et nous barrer loin dans les questions philo, puisque nous avons face à nous des élèves avec une base émotionnelle "normale" (si tant est que cette normalité existe), qui se sont déjà construits en partie. Mais en classe spécialisée, la question se pose. La plupart des enfants n'ont pas acquis la construction personnelle logiquement atteinte à leur âge. Ils sont donc, comment dire, "paumés"? Moui, le mot s'applique pamal à la situation. Entre histoires de vie pourries et retards divers et variés, nous observons qu'à trop leur laisser de choix, ils ne savent plus que choisir. Le genre qui, à l'opposé de moi-même, serait en panique devant un buffet, et finirait par ne rien manger. Nous n'avons donc pas d'autre choix que de leur proposer les codes sociaux "normalisés" puisque cela les rassure. Je reste un peu embêtée car malgré leur retard de développement, ils ont aussi le droit de ne pas être enfermés et de choisir ce qui leur convient. En fait, oui, je suis bien emmerdée. Et j'espère qu'on leur laissera tout de même le choix. 




Et sinon, dans la classe, ça va. Ces élèves nous font fonctionner à 125% de notre VMA de calme et de patience, tant est si bien qu'on termine la journée avec tout juste la capacité de faire cuire des pâtes. Mais bon. To be continued :) 

mardi 5 septembre 2017

Heureux qui comme Ulis.

4ème rentrée, J+2. 

Après avoir balisé comme une tordue pendant 2 mois (à ma décharge, l'enseignant référent - sorte de prof principal pour les élèves en situation de handicap - m'avait dit de me reposer à fond pour être belle et pimpante à la rentrée, et évidemment, mon cerveau a réagi en mode NO NO NO), il a bien fallu me rendre dans cette nouvelle classe le matin du 4 septembre. 

En juin 2017, j'ai été affectée dans une école de campagne à la réputation parfaitement infecte. J'étais à priori attribuée à une classe de cycle 3 (CM1 et 2), mais après un apéro chez des collègues dont l'une m'a bien foutu la trouille en dépeignant la vie de cette école infernale, je me suis demandé quel était mon champ d'action pour éviter cela. Je venais de passer 6 mois en quarts temps, j'avais envie de passer une année à avoir envie d'aller au travail. J'ai réalisé que dans cette école était installé un dispositif ULIS (anciennes CLIS), grosso merdo des classes pour les élèves soit 1) en grande difficulté scolaire soit/et 2) qui sont déficients mentaux de manière générale. Bon, et ce n'est pas un scoop, ce qui me plaît le plus dans l'enseignement, c'est le social. Qu'à cela ne tienne, soyons foufous, j'ai demandé le poste et... je l'ai eu. 

1) Le soulagement

2) La réalisation 

3) La panique 


Comment gère-t-on des élèves en situation de handicap ? Comment s'adresser à eux? Comment organiser son temps de travail ? Ces élèves ont des emplois du temps individuels car ils sont suivis à l'extérieur en soins divers. Leurs cerveaux ont également des emplois du temps individuels, et le maître-mot est ADAPTATION. Bon, ça, ça va. Mais le deuxième maître-mot est ORGANISATION. Argh, c'est peut-être là que ça va coincer. Cette panique ressemble un peu à de la peur de retrouver une classe (de 12, certes, but still) d'enfants terribles comme en année de PES. Bref, j'ai remué la situation environ 1367 fois (souvent la nuit entre minuit et 6h du matin, tant qu'à faire) dans ma tête, anticipé tout ce qui pourrait arriver de pire (me faire mener par le bout du nez), questionné environ 86 personnes susceptibles de m'apporter une once d'aide, jusqu'au jour fatidique de la pré-rentrée. 




La pré-rentrée des profs, c'est toujours le jour où l'on réalise que tout ce que l'on a minutieusement (ou pas?) préparé n'est PAS PRÊT. PAS PRÊT. PAS PRÊT. PAS PRÊT. PAS PRÊT. PAS PRÊT. Mais qu'il faudra bien que ça le soit lundi à 8h30. 

Étrangement, je me suis détendue la veille et l'avant-veille de la rentrée. Sûrement grâce au fait de savoir que ça allait enfin arriver, qu'il n'y aurait bientôt plus de totale inconnue. Et finalement... ça s'est bien passé :-) Je suis passée en mode scanner, j'analyse tout, les enfants, la classe, la façon dont ils apprennent, leur langage, leur caractère, ce qui les botte, ce qui fonctionne ou pas, les collègues, les horaires, les clés, les cahiers, les étiquettes, les "hein?" (beaucoup d'élèves en difficulté de langage) qui m'échappent mais... l'année démarre plutôt bien, en plaine. On verra plus tard pour les montagnes. 






mardi 7 mars 2017

Vis ma vie de Maîtresse Tapisserie.

Bienvenue dans un nouveau point Bouche-Trou de fin d'hiver. Oué, bon. On comprendra aisément qu'effectuer quatre compléments, c'est pas spécialement ma came.




Le début de semaine est devenu ma bête noire : deux journées assez longues où le moindre plaisir est accueilli comme le Messie. Bon, et il y en a. Y'a L. qui fait des jolis compliments. Y'a elle qui veut me montrer ses nouvelles baskets. Y'a lui qui te raconte sa vie et dont tu sens l'intérêt certain pour cette affaire. Y'a R. qui essaye d'étrangler une camarade et... Nan, j'déconne, ça c'est pas jojo. Oui oui, il a vraiment essayé de l'étrangler. Du coup, on a les parents aux fesses. Et on s'en passerait bien. Et le pire dans l'histoire, c'est que le gamin fait ça aisément, tactac la technique, on dirait qu'il a fait ça toute sa vie. Moi je suis encore restée sur les techniques d'étranglement de Colombo, Maigret tout au plus, allez Jack Malone, adjugé vendu. 



Je tiens aujourd'hui un top combo de la situation la plus épuisante. Tous les faits s'apprêtant à être racontés se sont produits SIMULTANÉMENT. Oui. Personnages : A, M, J, S, 6 ans. Les enfants se dirigent vers la sortie, il est 15h50. Récemment, B. a encore tenté un DAB (je l'ai froudroyé du regard, un peu comme ça : 


et du coup il a cessé.) Bref. Je m'égare. Nous nous apprêtons donc à sortir. En l'espace d'une minute, M. qui est déjà un peu "différent" et en orbite autour de la réalité a eu le temps de disparaître, pendant que A. se ramassait la gueule dans les escaliers (bon, ok, ça fait extrêmement mal) et que J. disparaissait avant que j'aie eu le temps de le voir partir avec ses parents. A.bis vint alors me dire que franchement, H. était énervant à lécher sa colle à longueur de journée. Finalement, A. a évacué toute sa morve et écopé d'un beau bleu, on a retrouvé M., et j'ai pu retourner dans ma classe. Phew. 

Me VS Le début de semaine

Allez, tout va bien, retour aux bonnes choses pour la fin de semaine, je vais pouvoir faire mon métier dans de bonnes conditions.









mercredi 1 février 2017

Bilan des qualifications.

Jour 1 : Rendez-vous en terre (in)connue. 

Après avoir dit au revoir à mes collègues, il m'a fallu immédiatement me remettre dans un bain déjà testé : le cycle 3, les grands, les hormoneux, toussa. Bon, j'étais rassurée puis j'atterrissais à nouveau dans mon école de l'an dernier. Une équipe connue et appréciée, une école toute équipée, pas le plus inquiétant donc. Et je n'ai pas été déçue, à tel point que j'ai peu de choses à dire sur cette journée... parce que TOUT ROULE. Le cadre est posé. La cohésion d'école créé la sécurité et le calme. Tout est dit. Et beaucoup devraient prendre exemple sur ce modèle. J'ai même apprécié de travailler avec des "grands", c'est dire. To be continued. 

SALUT, C'EST RE-MOI.


Jour 2 : Sabrina, l'apprentie sorcière.

Me voilà passée de l'autre côté de la route de l'école du jour 1, mais à la maternelle, chez les Grande Section. L'équipe était également connue et appréciée. Bon, on m'avait dit de me pointer à 8h, chose que j'ai faite. Malheureusement, la plupart des membres de l'école n'arrivent qu'à 8h30. C'était long.
J'ai finalement réussi à trouver le Saint-Graal dès mon entrée dans l'école (AKA La Photocopieuse), et à m'organiser mentalement. Qui plus est, je connaissais déjà quelques têtes (des petits frères et soeurs d'anciens élèves de l'an passé), le milieu m'était donc très familier. J'ai découvert le niveau qui précède le CP. C'est plutôt chouette, si on passe outre les quelques sales caractères qui constituent la classe. Je vais leur montrer qui est l'papa. Non, en vrai, j'ai bien aimé aussi. Et j'ai trouvé des alter-ego parmi les collègues : du genre à coller une photo d'un homme politique sur le téléphone de la direction. MERCI, j'avais des étoiles de rire dans les yeux. 

Perle à l'accueil du matin :
" - D'habitude, c'est la maîtresse qui fait la date ou c'est vous qui la dites?
- C'est nous qui la dites !!!! "
(to myself) - This is gonna be a good day. 



Jour 3 : En pleine tempête. 

Est venue la première journée "real challenge" : une classe de 30 Tout petits, petits, moyens. Ils ont donc entre 2 et 4, aiment beaucoup les crottes de nez, leur doudou et leur ATSEM. Et désormais je vais croire au dieu des ATSEM je crois. J'ai fait connaissance avec G., ATSEM depuis 30 ans dans l'école, qui fait donc partie des murs et des piliers de l'école. Et - damn god - c'est utile et précieux. J'ai également fait la connaissance d'une nouvelle pédagogie qui me rendait un peu perplexe : la pédagogie Montessori. Bon, le concept, c'est l'autonomie et l'apprentissage au rythme de chacun. Dans la classe, il y a des plateaux (de vrais plateaux) avec des activités dessus (renverser, laver, visser, découper... des actions quotidiennes), avec des matériaux solides puis liquides. Durant les temps d'ateliers, les élèves se servent et se débrouillent à l'atelier, qui a été expliqué en début d'année (je suppose). Chaque semaine, ils ont un programme (photographié, car petits) à réaliser avec ces plateaux. J'ai donc décidé d'observer, malgré mon choix de rester sur des ateliers "classiques" (car plus rassurant pour débuter à ce niveau). Et j'ai observé des choses assez miraculeuses. Vous observerez avec étonnement l'attitude des enfants qui, malgré leur très jeune âge, font preuve d'une grande maturité : s'ils ont besoin de parler, ils posent la main sur mon épaule et attendent que j'ai terminé (vraiment, ils ATTENDENT, ils sont calmes, c'est fait avec douceur), ils sont capables d'effectuer énormément de tâches dans la classe et sont très débrouillards. Je n'ai observé qu'une journée, mais je vais m'y intéresser de près. Bon, après, concernant les compétences fondamentales (manipuler un crayon), c'est plus compliqué pour certains. Et les écarts se creusent rapidement entre ceux qui sont prêts à compter jusqu'à 30 (programme de Grande Section) et ceux qui sont encore dans la difficulté pour dénombrer. En définitive, il y a des choses à prendre et à jeter dans cette pédagogie, mais elle mérite qu'on s'y intéresse et qu'on y pioche des idées, je pense. 



Jour 4 : Un jour sans fin. 

Un CP dans une usine à ga...pardon, une grande école. Alors un conseil : ne prenez pas goût aux écoles tranquilles. Parce qu'atterrir dans un milieu plus compliqué fait tout drôle. Ce fut la journée de la mise à l'épreuve, mais mon flambeau est toujours allumé.
Dans un premier temps, il m'a fallu vingt bonnes minutes pour trouver l'école concernée, planquée au fond d'une rue bien évidemment en sens unique. Je mets un point d'honneur à ne pas utiliser mon GPS, à faire fonctionner mon sens de l'orientation et jusqu'alors ça a très bien marché, mais là, sérieusement, les gars, faut arrêter, pourquoi ne pas mettre l'école au fond d'une grotte aussi? On m'avait prévenue, mais j'ai quand même débarqué en pensant qu'il s'agissait d'un collège, 5 minutes avant l'entrée en classe des élèves... Oh, wait, non, en fait l'accueil en classe a commencé. Je suis entrée en classe, 4 élèves déjà en train de faire la rumba sur les bancs, bien, oké, cette journée va être compliquée. J'ai (pour la première fois) laissé mes élèves pour aller faire des photocopies, parce que - putain - pas le choix, en espérant qu'ils ne m'aient pas arraché le tableau en arrivant. Et c'était parti.
On a commencé dans un coin regroupement où j'ai eu la surprise d'observer plusieurs DAB en réponse à chaque question que je posais (pour plus d'information sur le DAB, cette mode terrible, voir ici)  - déjà j'étais pas jouasse, mais là. Et puis à l'énonciation de mon prénom voilà que Jean-Michel Relou répond " Monprénom-Fistule "... Well. Une fois, deux fois, trois fois. Je demande s'il y a un problème avec ce prénom. Bon, en fait, c'était le personnage du livre qu'ils lisent en ce moment. Damn. Les auteurs, vous réfléchissez deux secondes avant de donner des surnoms du type "fistule", qui sont transformés en "fistouille" pour les moins aguerris ? (pour la référence, ne cliquez nulle part, c'est une sombre histoire). 



La journée a commencé et s'est poursuivie. J'ai réalisé à 15h qu'un de mes élèves était en réalité UNE de mes élèves - Whoopsie, déso. J'ai - du coup - confronté mes propres clichés... mais vraiment, je pensais que c'était un garçon. Et le petit "tiens, c'est un prénom de garçon ça?" lors de l'appel a vite glissé loin de mon esprit. Beaucoup de reprise des règles de vie, beaucoup de remise en ordre, beaucoup d'énonciations concernant la vie de classe, et beaucoup d'hallucination. Et aucun poids, puisque je ne suis là qu'un jour et que cette classe n'est pas vraiment la mienne. Comme une envie de remuer tout ça bien proprement. 



En espérant que les prochaines journées se déroulent de manière plus agréable, je ferai au mieux. Bien évidemment, tout ce vécu est lâché comme un boulet à l'écrit puisque même s'il ne s'agit pas de ma classe, je ne vais pas ouvertement m'exaspérer devant eux, ça marque un enfant. Bon, sauf pour le DAB. Merde. 



Jour 5 : The force awakens. 

Retour à l'école-source, celle du jour 1, où le calme et le respect m'épatent. Heureusement que cette journée suit celle du jour 4, elle me rappelle que oui, je fais le bon boulot pour moi. 




mercredi 25 janvier 2017

Once again.

25 janvier. C'était dit depuis le début de l'année, j'allais me barrer le 25 janvier. Eh bien soyez-en sûrs : quitter une école me fait toujours autant chier. 

J'ai rangé mes affaires, j'ai rendu celles qui n'étaient pas à moi. Et puis comme à chaque fin d'année (sauf que ce n'en est pas une), j'ai dit au revoir. Aux collègues et aux élèves, avec une petite pointe d'amertume et d'inachevé, quand même, comme d'habitude (Chimay Leffe, i chété bouscule). 

Bilan de ces 4 mois + 25 jours

Les élèves non lecteurs sont devenus des petits lecteurs. Et c'est énorme. Énorme. On est passé de 25 élèves à 26, puis à 24. J'ai un peu stagné dans mes qualités de préparation, mais j'ai avancé dans mes capacités à adapter mon enseignement à chaque élève. J'ai encore raconté beaucoup de bêtises en classe et avec mes collègues. 



#Pauseperle2017 : Au sujet, des muscles et de la langue qui est un "muscle très musclé"...
N, 8 ans : " Mais maîtresse... J'vois pas bien ce qu'on peut faire comme sport avec la langue...?"
Maîtresse : "..."



J'ai appris à prendre encore plus de distance avec l'administration et le troupeau de bureaucrates qui nous gère. J'aurais dû être inspectée, je ne l'ai pas été, pour des raisons de "directives". Pas d'inspection = pas d'évaluation, pas de conseils, pas d'augmentation de salaire. C'était terrorisant mais j'aurais aimé être inspectée, avoir un suivi, avoir un retour. C'est comme si je mettais mes élèves en plan de travail (exercices autonomes) toute l'année. Travaille, travaille sans jamais savoir comment tu pourrais faire mieux. 

Du coup je construis ma réponse à cette question que les médias nous foutent sous le nez :
POURQUOI LES ENSEIGNANTS DÉMISSIONNENT ? 

Comment présenter les choses sans qu'on nous ressorte le coup de la victimisation? Oui, j'ai trois mois de vacances dans l'année. Ok. Et après ? Imaginez une classe. Imaginez-vous enfant. Un jeune enfant qui arrive à l'école pour apprendre, qui aime découvrir, qui aime partager. Pendant sa première année, il passe à la loterie. Au choix, il récupère un enseignant qui l'aide, le guide, lui dit comment mieux faire (parce que n'oublions pas qu'il n'a pas encore appris concrètement, il a besoin d'entraînement), ou, s'il tire la mauvaise carte, il se coltine toute l'année un enseignant qui le lynche et lui répète ce qui ne va pas sans lui proposer d'alternative pour mieux s'épanouir et réussir. Un premier tri s'effectue durant cette première année. Imaginons qu'en deuxième année, avec une difficulté similaire, l'enfant tombe dans une classe où ses camarades lui tournent le dos et ne sont pas agréables avec lui (deuxième loterie, il peut aussi tomber sur un groupe génial). Un deuxième tri a lieu. Enfin, en troisième année, l'enfant est confronté à une hiérarchie qui ne l'écoute pas, le dispute car il n'a pas fait ses leçons - mais a oublié de lui faire écrire ses leçons -, lui demande d'aller suivre une leçon loin de chez lui car elle ne veut pas se déplacer, et ne propose aucune solution face aux difficultés vécues par l'enfant dans son travail. Troisième tri. Je me demande combien d'enfants il reste dans la classe au bout de ces trois ans. Il s'agit juste de transposer cette situation à un monde adulte mais qui reste un monde en apprentissage. Sans écoute ni empathie ou considération, aucune entreprise ne fonctionne. Et l'Education Nationale manque cruellement de ces trois qualités à l'heure actuelle. 


Mais allez, souviens-toi du pourquoi. Du pourquoi on fait ce boulot. Il y a peut-être moins de raisons de continuer que d'arrêter, mais elles sont balèzes. Et elles ont des prénoms, elles disent des choses rigolotes et mesurent généralement 1m12. 



Prochain challenge :

Survivre 4 mois dans une école différente chaque jour, à faire classe à un niveau différent chaque jour, avec une équipe différente chaque jour. The perks of being a wallflower. 



mercredi 14 décembre 2016

Un jour viendra peut-être, un jour au goût de miel...



Ci-dessus le chant de Noël chanté par les élèves à l'occasion de cette nouvelle fin d'année. Un truc niaiseux en apparence, je ne l'avais même pas écouté avant la répétition puisque ma classe n'était pas concernée. Et là, bim, les voilà qui chantent tous ensemble ce petit truc niaiseux en apparence. Et ma classe qui en deux écoutes la connaît par coeur. Il doit bien y avoir une raison. En tout cas c'est très joli et ça rappelle qu'il faut les faire chanter pour plein de raisons.

1) Certains se révèlent.
2) Certains se calment.
3) Beaucoup s'amusent.
4) On passe tous un bon moment.

" Qu'importe il faut attendre en ce soir de Noël, que les fusils se taisent et répondent à l'appel de cette parenthèse qui s'appelle Noël... " Tristement actuel. 

Pas ou peu de lien avec ma profession, mais je commence à avoir beaucoup de difficulté à ne pas me laisser atteindre par ce qui arrive en Syrie. Et je ne peux rien faire. Donc je fais à ma hauteur. #Alep

Je vais prochainement quitter ma classe (encore 4 semaines et classe et une inspection) pour effectuer un remplacement de remplaçante (oui oui), dans 4 classes et 4 écoles différentes. Nouveau challenge. La relation avec les élèves risque d'être bien différente, mais j'imagine que je devrais tout de même y trouver mon compte, partons sur cette idée. 

Perle du jour :

#dailyprof En regardant une maquette du corps humain et des organes.
" - Mais maîtresse, où qu'il est le chauffage ?
- Ben... Au sol.
- Mais non le chauffage dans le corps !
- Hein ?
- Ben oui, le chauffage où la nourriture elle descend !
- ...(éclair de génie traductif) Oh, l'oesophage?
- wiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ! "


jeudi 3 novembre 2016

#dailyprof, jour 36 : retour de vacances & lecture à haute voix.

J'abrègerai les petites larmoyances liées au retour de vacances et aux petits mots gentils, mais c'est encore un peu l'hystérie de reprendre et de retrouver mes tronches de cakes. Voilà. Mais du coup, dans ces journées où on travaille beaucoup et très bien, y'a souvent des petits questionnements qui émergent. Voici plutôt.

Contexte : Nous lisons actuellement un album/petit roman adapté à l'âge de mes élèves, soit 7-8 ans. Dans cette histoire, un petit garçon réclame à tous les membres de sa famille la lecture à voix haute d'une histoire. Chaque personnage refuse car il a sa propre bonne raison : du ménage à faire, du travail à terminer, un film à regarder, etc. Le gamin se retrouve allongé sur le sol de sa chambre avec son lapin et son poisson rouge, déçu que personne n'accepte jamais de prendre un instant pour lui lire une histoire. 

Suite à la première scène de refus collectif, nous avons lu ensemble des questions et les élèves ont dû y répondre. Le questionnaire demandait notamment aux enfants d'entourer les termes qui décrivaient le mieux le petit du livre. De mémoire, nous avions le choix entre : solitaire - joyeux - déçu - choyé - délaissé - aventureux - fainéant - triste - casse-pieds, et peut-être un ou deux autres. 

Dans ma tête, il était évident que - après avoir évidemment expliqué le sens de tous ces termes, car on n'y pas pas à l'aveugle quand même - la majorité des élèves allaient constater la déception du petit garçon, et voir qu'il se sentait un peu livré à lui-même. Bon, c'est peut-être mon habitus d'enfant à qui on a lu des histoires tous les soirs qui a parlé. Plus de la moitié de ma classe a entouré les termes "solitaire", "fainéant" et "casse-pieds". Wait... what ?

Voici leurs explications, qui font que je n'ai pas pu compter ces réponses "faux", puisqu'elles sont tangibles et répondent à leur propre logique : 

Fainéant... " parce qu'il pourrait lire son histoire tout seul quand même! "
Casse-pieds... " car il embête tout le monde à demander de lire une histoire."
Solitaire... " parce qu'il aime bien rester tout seul."
Fainéant... " parce qu'il fait pas d'effort, il sait lire."
Casse-pieds... "parce qu'il fait la tête alors que ses parents ils ont pas le temps."



Alors je sais pas pour vous, mais pour moi c'est assez symptomatique. J'entends constamment mes collègues dire que les parents "n'ont plus le temps", "sont débordés", "ne s'en sortent plus" et que les enfants "ne tiennent plus en place", "ne respectent plus l'autorité"*, etc. Je vois (j'observe) l'état d'hypnose dans lequel sont mes élèves lorsque je leur fais une lecture à voix haute. Et là, je viens de combiner les deux, je crois qu'une connexion de synapses a eu lieu.

Est-ce qu'à se nourrir de plats tout prêts, on en oublierait pas comment cuisiner?
Et pourtant, je suis une bonne grosse nerd qui aime les écrans, l'internet, les films et les (super-)héros, et j'encourage toutes les générations à découvrir tout ça, et à jouer. Mais j'en reviens encore à ce fichu mémoire, et je me dis qu'il faudrait quand même donner de la nourriture à ces petits cerveaux. Parce qu'ils y tiennent, à leur petit rituel de lecture le midi. Et s'il y en avait un le soir, je pense qu'il ne serait pas de refus. 

" Mais la lecture à haute voix, c'est aussi un plat tout prêt, non?"

Alors, oui mais non. Certes, nous tendons l'histoire sur un plateau. Mais on est sur un plan radicalement différent. Un enfant qui lit est à 80% dans la lecture pure, c'est à dire le décodage, il "défait les lacets" pour obtenir une suite logique dans sa tête, et 20% dans l'imagination. Un enfant à qui on lit n'a pas à fournir ce travail de décodage (qu'il fournit soit dit en passant à chaque instant à partir du moment où il combine les sons), et cette lecture est donc à 90% dédiées à l'imagination, à la compréhension et à la conceptualisation (j'accorde les 10% restants au sommeil et au temps avec le lecteur). Du coup, non, ce n'est pas un plat tout prêt, très loin de là. 

* Petite question qui concerne l'autorité... Quelle serait l'importance de l'implication relationnelle dans la création de l'autorité? Je me demande si, en lien avec cette histoire d'instants de lecture, l'autorité ne découlerait pas aussi de cette possibilité d'accorder des instants rituels. Ou de la mise en œuvre de possibilités d'accorder ces instants. Mh, en fait, non, je ne me le demande pas, j'ai ma réponse. 



La bise.

jeudi 20 octobre 2016

Champions du monde.

" Et toi, maîtresse, t'es une maman? "

" Mais non, on peut pas faire tout ce qu'on veut, parce qu'il y a des limites, parce que sinon, les autres, en fait, on peut leur faire mal. " 

" (le me)- Pourquoi tu pleures, L?
(élève 1) - Mais parce que je me suis trompée, ma maman va me gronder...
(Champion) - Mais faut pas pleurer, L, regarde, je me trompe tout le temps moi, c'est pas grave.
(élève 3) - Mais oui, tout le monde se trompe, même la maîtresse elle se trompe, c'est comme ça qu'on apprend. " #Cestpasmoiquilaidit

J, 7 ans, connaît un nombre de fleurs incalculable.
J, 7 ans, sait ce que sont des espadrilles.
T, 7 ans, réalise un jeu de devinettes avec finesse et précision.

Shiny them. 

To do :

Arrêter de lever les yeux au ciel, ce réflexe naze.

mercredi 19 octobre 2016

Le temps qui s'écoule est immense.

Ma tête au dernier réveil de période 1, ce matin.

Part 1 : Il s'ennuie.

"Pour louper l'école, je ferais n'importe quoi, pour louper l'école, moi j'irais jusqu'à..." N, 8 ans, et son regard d'ennui profond 80% du temps qu'il passe en classe. Ce n'est pas de l'insolence, ce n'est pas de la fatigue, on entame un pro rata de 50% absence de confiance en soi et 50% de "Que fais-je ici?". Il se fait chier. Damn. Il se fait chier. Il s'ENNUIE profondément. Le français, les maths, la copie, la lecture, compter, quel intérêt? Pour quoi, pour qui ? Et en fait, il a raison : pour quoi? pour qui? Est-ce qu'on leur explique tout ça? J'esssaie, en ce qui me concerne, mais impossible à faire chaque jour et pour chaque activité. Comment montrer à un gamin de 8 ans à quoi sert la leçon sur l'addition posée? Je voudrais avoir une bonne raison PRAGMATIQUE pour chacun des apprentissages. C'est le but. Certains y arrivent sûrement. En attendant, on essaie de lui expliquer, et de faire le plein d'indulgence face à son sourire qui veut dire " Je suis désolée maîtresse mais là je me fais vraiment chier, je ne sais pas pourquoi tu me demandes ça et à vrai dire je m'en fous un peu.". On oublie, face aux groupes faciles et dociles, la nécessité d'expliquer les raisons du pourquoi du comment. Et pourtant, ça fait désormais partie de mes projets : faire une liste des apprentissages avec un but associé dans une situation quotidienne. Bonne chance maîtresse. Je suis désolée N, j'aimerais vraiment que tu t'amuses et que tout ça te motive. On va trouver, on va faire mieux. Je décèle déjà des points d'accroche : les sciences, le monde environnant. On va trouver. Et il en sait, des choses.



Part 2 : Goddam kids.

Contexte : Je propose souvent à mes élèves d'apporter en classe des chansons/morceaux de leur choix pour les faire découvrir aux autres. Seule exigence : rien de radiophonique, rien de violent ou vulgaire. En partant de ce point, j'accepte tout. J'écoute les chansons, et si elles respectent les conditions, je les diffuse sur le poste de la classe (porte supersonique dont j'ai fait l'acquisition cette année, avec des lumières étou). J'ai des élèves de 7-8 ans. Résultat : dans ma playlist 2016-2017 j'ai du Daniel Balavoine, du Céline Dion (Pour que tu m'aimes encore FTW), du Menelik, du récent en somme. Les enfants sont merveilleux. Et blague à part, certains m'ont fait découvrir des choses très très sympa (genre ça : https://www.youtube.com/watch?v=guRpdsAbUv0) qui satisfont ma curiosité musicale et me donnent envie de passer des heures à écouter des accordéons sous un ciel d'été. Voilà. Je pourrais peut-être écrire des alexandrins?

[Quand une mère dit que le saut de classe pour son fils, ça le fait pas, après avoir insisté pour l'obtenir.]




Et comme d'habitude, le clan des attachiants remporte la première manche de l'année. Ce sont ceux qui me font soupirer le plus et qui paradoxalement (ou pas?) progressent le plus en très peu de temps. Du coup, j'ai un élève qui doit voir l'orthophoniste depuis au moins 3 ans et qui va ENFIN le voir après une n-ième demande. ENCORE UNE VICTOIRE DE CANARD.

Part 3 : Keep learning.

I finally felt that feeling again : i don't know ANYTHING about them and how to teach them. But i do learn.

Mais certains petits résultats te font sentir que tu commences à progresser. Comme cette élève qui écrivait phonétiquement il y a quelques semaines et qui commence à me former des vrais mots avec des vraies syllabes. Et pour tout le reste, il y a Eurocard Mastercard. 


Part 4 : J'avais envie de l'emplâtrer.

Parfois, on fait des réunions. Ce sont des conseils où se réunissent enseignants, représentants municipaux et parents d'élèves. Parfois, tout se passe bien. Parfois, il y a même des gâteaux. Et des jus de fruits. Parfois, on discute, entre adultes. Et parfois, parfois, un con se place. En 2h nous connaissons toute sa vie. Laissez-moi vous dire, cher monsieur, avec tout le respect que je vous dois, que je ne me permets pas de vous raconter ma vie en réunion professionnelle, que je ne vous donne aucune leçon sur votre façon de gérer votre emploi, que je ne me permets pas de familiarités si je ne vous connais que depuis 30 minutes, que je ne vous propose pas de devenir votre coach personnel pour réaliser vos missions sans avoir la moindre idée des tenants et aboutissants de votre métier et de vos objectifs. Je vous prie de faire de même. Et si vous avez un grand besoin de le savoir : oui, on vous entend, oui, on vous voit, mais vous seriez plus intéressant à moins vouloir l'être. Bisous éthiques et responsables, et bienveillants. Quand les cons sont braves...

Dans l'immédiat : c'est les vacances les gars !

mercredi 12 octobre 2016

Hey brother, do you still believe in one another?

Pour la première fois depuis des semaines, je viens de me dire "Oh chouette, j'ai vingt minutes devant moi, qu'en faire ? ". Du coup, je passe par ici pour faire un point #dailyprof. 

La première période s'achève et la maîtresse a rarement été aussi crevée. D'ailleurs, c'est ce qu'elle se dit à chaque fin de période. Le corps et son éternel renouvellement doivent nous faire oublier cet état de fatigue au fur et à mesure que le temps passe, je ne vois pas d'autre possibilité. 



Ma classe de loupiots a bien pris ses marques, on commence (au bout de six semaines, oui), à avoir un bateau qui flotte à peu près. J'ai aussi compris (ou re-compris) qu'en fait, je n'ai pas un double-niveau mais une classe à 25 niveaux. Damn. Shit. How am i going to do with that? On avise.

L'anecdote : Cette enfant avide de validation qui pleure dès qu'elle n'est pas première dans le rang d'élèves. Prise entre quatre yeux au milieu de la cour de récré, je me suis revue à son âge et je lui ai dit qu'elle n'était pas moins importante si elle était au 2ème, 3ème ou 10ème rang.  Plus de larmes depuis. Les choses sont si simples, parfois.

On rencontre les psychologues scolaires. Vaste plaisanterie.

Nous manquons cruellement de (bons) psychologues scolaires. Parce que 1) les psychologues scolaires ne sont pas formés à la psychologie mais sont souvent d'anciens enseignants et 2) il y a un psycho pour une quinzaine d'écoles, environ. J'ai rencontré le psychologue le plus démago de l'Ouest, et je me demande comment on peut aider un enfant en ayant déjà si peu de qualités sociales avec des adultes. Ce Monsieur s'écoute allègrement parler, et propose de "faire des bilans", de "voir ce qu'on peut faire", "d'essayer ça", mais RIEN pour un enfant sujet à information préoccupante, RIEN. RIEN pour un enfant de 8 ans qui ne lit pas. Et des collègues qui se sentent agressés quand on émet un avis sur la famille... des choses à régler messieurs dames ? Et pendant ce temps, des enfants de moins de 10 ans croupissent dans des situations de merde. Au top. 

Ok, il faut accepter les limites. M'enfin bon, là, quand même. Et ça rend grincheuse.

Bon, y'a aussi des choses plus rigolotes.

On part en formation pédagogique. Loin. 

Deux heures et demi de route A/R pour (encore une fois) écouter un Inspecteur s'écouter lui-même et ne pas laisser la parole à certains protagonistes intéressants et impliqués (un agriculteur gérant une ferme pédagogique qui apporte un panier de légumes pour décorer la table et qui n'a même pas eu 3 minutes pour parler de son projet, damn ça me broie le ventre). Bon, à leur décharge, on nous a présenté plein d'ateliers scientifiques intéressants suite au discours, on nous a donné plein d'idées. Il faut du budget, mais tout est possible, et motivant. Et puis on a gagné un aller-retour dans le monospace avec les collègues qui m'ont déjà attribué plusieurs surnoms. Bordel, ça y est je suis attachée. Et il va encore falloir partir.

On n'est pas super payés, mais qu'est ce qu'on se marre

Allez, c'est tout pour moi, il faut que je dorme. Bisous

mercredi 21 septembre 2016

Maîtres vivants & étoiles d'araignées.

Year 3, day 15.

Bon, il est temps de faire un petit compte-rendu du début de la croisade.




15 jours en classe et déjà tout un tas de choses à raconter, à analyser, à prendre en compte. Pour la petite histoire j'ai donc débarqué sur une classe avec une annonce de cette affectation quelques jours avant la rentrée (je m'estime heureuse de cela, d'autant plus qu'il s'agit d'un niveau que je connais). J'ai rapidement pris la classe et j'ai pu observer que certains collègues nourrissent allègrement le mythe de l'enseignant qui ne fout rien, pour ma plus grande joie. Voici donc une petite liste du bilan de rentrée en 5 points.

1) Je vais être inspectée.

C'est officiel et confirmé. Donc l'inspection, c'est une personne qui vient te voir dans ta classe (entre 30minutes et une matinée), qui t'observe et te fait ensuite un compte-rendu en te posant des petites questions reloues du type "Comment ça, vous n'avez pas 30min à accorder à chaque élève par jour?". Un peu foufou, voyez. Je caricature un peu, mais l'idée est là. L'inspection se veut bienveillante et aidante pour la suite de la carrière. Elle l'est parfois, je pense. Mais elle est malheureusement très souvent déconnectée du terrain et de la réalité de la classe. Les "grands" de l'EN sont souvent ceux qui ont le moins été dans les classes en tant qu'enseignants. Une inspection qui intervient en deuxième année en tant que titulaire (soit la 3ème année d'enseignement), précédée de visites pédagogiques (ahem, ça, ça dépend de qui on a en face). Je ne connais pas encore mes futurs interlocuteurs (interlocutrices en fait) donc restons "wait and see", mais en toute honnêteté ça n'a rien d'agréable de savoir que l'autorité de l’Éducation Nationale se satisfait de nous voir être dans les clous et bien remplir les papiers pendant qu'elle n'intervient pas auprès de trois enfants non-lecteurs de 8 ans. Et bien d'autres. Bref.


2) Mes collègues ont l'air de m'apprécier, et c'est cool.

Débarquer dans une ambiance un peu tendue, c'est pas très rigolo. Il suffit de ne pas mettre le nez dans les affaires des autres, et tout va bien. Me voilà à nouveau chouchoutée et aidée quand il y a besoin, ce qui est - avouons-le - une base solide.


3) Une classe qui s'annonce haute en couleurs.

25 schtroumpfs, encore du tout gentil, des sales histoires bien glauques, des espiègles, des champions, des mignons, et tout ça m'amène à une question : Est-ce que les personnalités des élèves se forgent en fonction du groupe? Non parce qu'il y a TOUJOURS le champion, toujours le mignon, toujours l'espiègle, toujours le responsable, toujours le sensible, le maladroit, etc... Pourtant, y'a pas de distribution des rôles en petite section, c'est du hasard. Du coup, je me pose la question des dynamiques de groupe, et du "Est-ce que cet élève aurait joué un autre rôle dans une autre classe ?". 

Une petite typo pour le lol ? Alléééé.

-T, 6 ans : Le petit précoce qui compte 100 x plus loin que ses camarades, mais qui par contre a la maturité normale d'un enfant de 6 ans et l'anxiété d'un salarié face à un potentiel licenciement économique. Ptit chat.
-Harry, Ron et Hermione, 7 ans : En vrai L, première de la classe, plein de cheveux, L, la gentillesse à l'état pur et T, gueule d'ange et premier aussi, inséparables, qui se revendiquent eux-mêmes comme "Harry, Ron et Hermione". Cela se passe de commentaire, pour ceux qui me connaissent.
- T, 7 ans : Champion. On n'a pas fini de se battre, mais je sais que je n'oublierai pas sa trogne.
- J & D, 8 ans, non-lecteurs : Mon combat de cette demi-année.
- E, 7 ans : Enfant du voyage qui, à l'opposé de ses frères et soeurs, adore l'école et s'y donne à 300%. 
- J, 7 ans : bilingue, bi-cérébrale : parvient à être à la fois en classe et dans son monde.

25 enfants en typo, c'est long. D'autres anecdotes viendront. Surtout quand commenceront le chant et le théâtre. Et toujours cette fichue envie de bien faire et de voir de la fierté dans nos yeux. Damn, ça me broie le myocarde ce fichu métier.


4) Toujours autant de gros kiffe à aller travailler, et ça vaut un peu tout l'or du monde, nan?

Bon, ben ça, c'est statu quo. L'école ça sent bon, on a plein de crayons, et les schtroumpfs sont générateurs de fous-rires. Il faut avouer que la trogne d'un enfant de 7 ans qui fait un relai à cloche-pied et les essais orthographiques de ses congénères sont fabuleux.


5) Pourquoi ces affectations sur un milieu d'année, hein, pourquoi?

 Oui parce que fin janvier, je ferai mes valises pour m'atteler à un autre groupe. Où, quel niveau? Aucune idée. Par contre je sais déjà que ça va encore être un départ difficile. Allez, ça fait les dents.










dimanche 28 août 2016

I wanna be the very best, like no one ever was, to catch them is my real test, to train them is my cause.

Non, c'est faux, je n'ai pas mis les paroles du générique Pokémon en titre de cet article.

C'est reparti pour une troisième année en CE1-CE2. Enfin, une troisième demi-année car le poste qu'on m'a attribué n'est valable que jusqu'au mois de février. Pour la suite, advienne que pourra. Allez, à vos crayons, maîtresse se remet au boulot ! La suite dans les jours à venir...

I SOLEMNLY SWEAR THAT I'M UP TO NO GOOD.






mercredi 6 juillet 2016

Year 2 : over.


Le dernier jour, y'a beaucoup de ça.


Et un peu de ça, aussi.

Les multiples mots des CM qui me remercient de leur avoir lu Harry Potter, et de les avoir fait rire  = <3
Bonnes vacances les petits loups, bien méritées après ces douze longues semaines.
Et bonnes vacances maîtresse, HELL YEAH!

jeudi 23 juin 2016

Je songe à mon bonheur personnel, et personne à part eux et leurs yeux blablablablabla...

Ok, le titre paraît un peu blasé, mais j'ai de multiples sources de bonheurs personnels, pas d'inquiétude :-)  C'est simplement la chanson que j'écoute actuellement (parce que j'aime bien Boulevard des airs, wala), et ça correspond un peu - beaucoup - au mood "fin d'année". 

Plus que trois jours avec la classe que je suis depuis le début d'année, qui restera "ma" classe de 2015-2016. J'ai rencontré et accompagné une autre classe, mais n'ai pas eu le temps de forger autant de lien avec eux. 

Demain. Jeudi prochain. Vendredi prochain. Et ce sera Year 2 over. On va se dire au revoir au portail et ils partiront l'esprit léger du haut de leur mètre vingt, comme si on allait se revoir le lendemain. Sauf que si je compte à peu près, nous avons passé 900 heures ensemble. Mas o menos. 900 heures partagées entre râlements, concentration, rires, réprimandes, découvertes, larmes, petits bobos, gros bobos, petits échecs et grandes réussites. Ils sont restés 900 heures à m'écouter - plus ou moins -, et j'en serais incapable aujourd'hui à leur place. Ils lisent mieux. Ils écrivent mieux. Ils me font des références à des trucs vus en début d'année. Ils me parodient lorsque je grogne "fichtre" pour rester polie. Ils rient avec moi quand je ne peux pas m'empêcher de rire à leurs interventions. Ils cherchent mon approbation, parfois. Ils me les brisent aussi parfois, mais ils cherchent à faire de leur mieux, contrairement à certains adultes qui ont oublié un peu cette dynamique. Bref. On va éviter le concerto de violons, je crois que ça me fera le même effet à chaque fin d'année. Je suis contente, je vais pouvoir me reposer un peu (trop). Mais merci de m'avoir donné le plaisir d'aller bosser quasiment chaque matin, bande de crapauds. <3 

#LePointInstitution : Aujourd'hui, 23 juin 2016, 213 enseignants sont encore à répartir dans mon département. Une trentaine sera en poste sur des ouvertures (postes imprévisibles avant septembre). Le même nombre sera sur des congés également imprévus. Mais le reste attendra. Attendra parce qu'il semble trop compliqué de donner à des enseignants leur lieu d'enseignement de la prochaine rentrée. Je suis de ce reste. Et croyez-moi, si un jour j'ai le pouvoir de faire bouger les choses, je le ferai. Il ne me reste qu'à croiser les doigts pour être en poste sur une seule classe et garder le lien que l'on peut construire avec sa propre classe. 

Year 3 is coming. Une petite inspection, toussa toussa. J'ai hâte.